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No51
   28-octobre-2004   

QUI SOMMES-NOUS POUR COCA-COLA?

Qui sommes-nous?

Qui sommes-nous dans l'entreprise? A l'occasion d'un récent licenciement, les salariés ne peuvent pas ne pas se poser la question. Je suis moi et pas un autre, mais ce que je suis est capable de comprendre l'autre parce que mon expérience me permet de me projeter dans l'expérience d'autrui. Même le saint est capable de comprendre le criminel parce qu'il a aussi été tenté, et si, comme le dit Platon "nul n'est méchant volontairement", tout fautif a des circonstances qui pèsent sur lui et peuvent réduire ses choix.

Qui sanctionne qui?

On dit que plus on fait de grandes choses, plus on risque des désastres, et que ceux qui ont le plus de responsabilités peuvent commettre de plus grandes fautes.
Dans les grands procès publics, on s'aperçoit que les sanctions ne sont pas toujours à la hauteur des responsabilités, et que même les lampistes paient pour les responsables qui passent au travers des mailles du filet.

L'entretien préalable est un procès interne

Dans une entreprise, le règlement intérieur est la loi de l'entreprise et les entretiens préalables avant sanction pouvant aller jusqu`au licenciement ou pouvant être sanctionnés par une faute, sont des procès intérieurs, non publics. En tant que salariés, nous avons le devoir de faire un travail effectif en fonction du contrat que nous avons signé. Ce que peut faire l'employeur est limité par le droit du travail, au niveau sécurité, santé, conditions de travail, rémunération, formation, besoins physiologiques et expression. Les syndicats et les représentants élus par les salariés n'ont pas les pouvoirs d'un avocat. Ils n'ont pas par exemple accès au dossier, et le salarié présumé fautif ne sait pas expressément ce qu'on va lui reprocher à part une date de moins de deux mois. Par contre, celui qui enquête, accuse et juge est le même: l'employeur.
Ces différences font que les salariés qui ont reçu des réprimandes, des avertissements ou des mises à pied ont intérêt à informer les délégués du personnel qu'ils ont élus, car il est plus difficile de préparer une défense quand on apprend au dernier moment le passé qui risque d'aggraver la décision de l'employeur.
A l'inverse, un employeur a intérêt à permettre aux délégués du personnel de connaître ses décisions de sanctions car si l'on veut pouvoir aider des salariés en difficulté, il faut d'abord savoir qu'ils ont des problèmes.

Quand la publicité de la sanction précède la sanction

Sous prétexte de rassurer les collègues de travail et l'équipe, l'employeur a entrepris avant l'entretien préalable une opération de relations publiques sur le terrain pour distinguer une erreur d'une faute. La première était a priori excusable car pouvant arriver à tout le monde. C'est vrai que la faute n'arrive qu'à ceux qui ont des problèmes. Mais est-ce une raison pour ne pas avoir d'empathie?
Si un cadre ne met pas en place un effectif suffisant par rapport à une situation de travail et qu'il y a un accident, le Ministère du travail considèrera que c'est une faute. S'il n'y a pas d'accident, c'est quoi pour un employeur? Un bon management? Va-t-il toucher une augmentation au mérite parce qu'il aura contribué au plan directeur d'économie?
Un proverbe dit "Qui veut noyer son chien l'accuse de la rage". Si un employeur nous dit qu'un salarié a la rage, on sait d'avance ce que cet employeur a en tête. Quand le terrain avant l'entretien préalable n'est pas suffisant pour influencer les salariés, un employeur est tenté de faire du terrain après la sanction s'il constate que les avis sont partagés, et même contradictoires dans la tête de chacun.

Y a-t-il encore du social?

L'employeur se sent-il concerné par les salariés qui ont des problèmes? Pour certains, oui, mais non sans mal car il faut parfois arriver à faire changer les méthodes qui ne sont pas adaptées, ou bien il faut arriver à faire comprendre que ce qu'on s'imagine n'est pas toujours la réalité.
Les salariés se posent des questions?
La faute, oui, elle est là, mais où est l'humanité?
On résout peut-être un problème pour un employeur en écartant un salarié, mais on créé une inquiétude pour tous les autres.
Tout le monde n'est-il pas en danger face à un relâchement dans le travail? Il suffit de laisser faire et de s'étonner ensuite.
S'il arrive à n'importe qui quelque chose du côté familial, une maladie ou un malheur, va-t-on le mettre à la porte?
Si une personne est en difficulté, le rôle du manager est-il de secouer le salarié ou de le jeter comme un malpropre?
Ne faut-il pas aider les salariés à faire la part des choses et à voir leurs devoirs?
L'employeur n'a-t-il pas à faire la différence entre une situation difficile choisie par le salarié et une situation qui lui tombe dessus?
La seule solution de l'employeur pour les salariés qui ont des problèmes familiaux est-elle: on vous licencie?

Sommes-nous en danger social?

C'est la question que commencent à se poser les salariés. On a un encadrement qui n'a plus d'état d'âme. Il a en vue le LU, le ME, bref que le fonctionnement de l'usine, les machines. Le côté humain, il commence à ne plus y en avoir.
L'employeur n'est-il pas responsable de la sécurité et de la santé des salariés, du stress qu'il provoque et de situations dangereuses qu'il laisse faire?
On ne tient compte que des résultats. Si le salarié n'est pas au top, faut-il dire: dehors? Les machines, l'employeur les entretient. Pourquoi pas les hommes et les femmes aussi?

Oui, il faut faire confiance aux salariés

L'humain a quand même une supériorité par rapport à la machine: il est capable de se réparer lui-même. Si du moins on lui en donne les moyens, ou du moins si on ne met pas un obstacle à cette possibilité.
Coca-Cola donne-t-il la chance à ses salariés de se réparer? La solution qu'on offre aux salariés non méritants est-elle une aide ou la porte de sortie?

Un grand projet de Coca-Cola

Récemment, Coca-Cola a informé le Comité Central d'Entreprise d'un projet d'aide aux salariés en situation de stress et de harcèlement. Des questions ont été posées par les élus et représentants, mais toutes les réponses n'ont pas été apportées.
De plus, l'employeur a annoncé le financement d'un organisme d'aide psychologique pour les salariés en difficultés ou en détresse. Encore faut-il qu'ils soient salariés, car si l'entreprise commence par licencier ces personnes, il ne va pas rester beaucoup de travail pour les bénévoles de l'association et le financement ne va guère servir.
Avant même d'informer les représentants des salariés de ce grand projet, Coca-Cola faisait la publicité de son initiative dans des salons sociaux où l'on cause. Pour les syndicats, ce qui compte, c'est le concret et pas les intentions. Nous ne pourrons croire l'employeur sincère que quand il démontrera son humanité auprès des salariés en difficulté et pas en fonction de l'argent qu'il verse à une association à but humaniste. Force est de constater que sur le terrain de Grigny, ce beau projet d'aide aux salariés en difficulté démarre en marche arrière.

Pourquoi se syndiquer?

Il existe aussi une association des salariés en difficulté ou non: le syndicat.
Se syndiquer permet de créer un lien amical, une information régulière, une assurance d'une intervention préventive, une entraide efficace. Etre aidé en cas de coup dur mais aussi en préventif est la base de la syndicalisation. Pouvoir revendiquer ensemble et améliorer ses conditions de travail et sa rémunération est la suite logique de cette syndicalisation.
Si nous pouvons en tant que syndicat aider les salariés en difficulté qui font appel à nous et si nous pouvons par accords améliorer notre vie de salariés, c'est parce que des salariés syndiqués sont élus. L'écoute d'un syndicat par un employeur dépend de l'audience qu'il a lors des élections professionnelles.

Alertez vos élus pour qu'ils interviennent

Il est important que les salariés qui ont des problèmes personnels pouvant avoir un impact sur leur travail alertent les délégués du personnel. Si des élections professionnelles ont lieu tous les deux ans, c'est bien aussi pour avoir des représentants pouvant aider aux relations avec l'employeur face à des situations personnelles.


   top.gif    Dépôt CCE Grigny: 28-octobre-2004   
   c.gif    Responsable de publication: André PUJOL